Neuf ans après sa biographie de la résistante Charlotte Delbo, prix Femina essai, Ghislaine Dunant met en scène la rencontre d'une femme et d'un homme portant les stigmates de la guerre.
A Review of Ghislaine Dunant, Charlotte Delbo: A Life Reclaimed, translation and introduction by Kathryn Lachman (Amherst and Boston: University of Massachusetts Press, 2021).
Soixante-quinze ans après la libération d’Auschwitz, une jeune fille prend le train, près de Drancy. Dans un silence recueilli, elle honore la mémoire de tous les déportés, en lisant “Charlotte Delbo, la vie retrouvée" de Ghislaine Dunant, prodigieuse biographie d’une rescapée des camps qui consacra sa survie à l’écriture admirable de l’impensable.
Ghislaine Dunant a reçu le Prix Femina pour ce bel essai sur l'oeuvre fascinante d'une femme qui fut déportée, qui écrivit l'enfer et le retour à la vie.
Connaissions-nous Charlotte Delbo ? Nous étions nombreux à avoir lu ‘Aucun de nous ne reviendra’ ou même sa trilogie ‘Auschwitz et après’. Le dernier livre de Ghislaine Dunant nous offre un énorme travail de recherche sur l’importance de cette œuvre restée largement méconnue.
Avec empathie et justesse, Ghislaine Dunant déploie l'oeuvre de la grande écrivaine, résistante miraculée d'Auschwitz, dont la voix inouïe et dérangeante mit tant de temps à se faire entendre.
Ghislaine Dunant consacre une biographie à l’auteure engagée qui a subi la déportation et dont les écrits n’ont cessé de dénoncer l’oppression. En offrant une tribune, par exemple, aux témoins de la guerre d’Algérie.
Pour beaucoup, sans doute, Charlotte Delbo n’était qu‘un nom, une silhouette « années 1930 » arborant un élégant fume-cigarettes. Rendons grâce à Ghislaine Dunant (photo) d’avoir ressuscité cette figure tragique et attachante dans un très beau livre.
Si cette biographie est aussi remarquable, c’est sans doute que Ghislaine Dunant a pour Charlotte Delbo plus que de l’admiration. Une passion qui ne se dément jamais, même lorsque Charlotte, après la guerre, milite pour des causes improbables, et soutient la bande à Baader. A chaque page, Ghislaine Dunant trouve de nouvelles raisons d’aimer Charlotte Delbo, et de célébrer, au-delà de son parcours intellectuel si singulier, son « goût immodéré pour la vie ».
- Pourquoi avoir consacré un livre à Charlotte Delbo ?
Je pense que c'est mon livre le plus personnel. J'y ai mis tellement de ma sensibilité, de l'écho intérieur aux interrogations de Charlotte... En tant qu'écrivain et lectrice, j'étais face à un écrivain extraordinaire. Personne n'est allé aussi loin dans l'écriture qui parle de la douleur physique et morale. (...) Mon projet n'était pas d'écrire une biographie. Je voulais avant tout faire connaître Charlotte Delbo.
Sept ans d’un travail patient — celui de Ghislaine Dunant pour écrire ce livre —, d’une recherche tenace dans les archives, dans une correspondance inédite, sept ans pour retrouver les témoins d’une vie et d’un combat, sept années de lecture, de relecture, pour cerner l’œuvre et ses abords, sept ans d’écriture et d’invention d’une forme, d’un point de vue, sept ans pour parvenir à cette spirale vertigineuse d’écriture qui atteint au cœur d’une œuvre. Sept ans comme un écho, comme un miroir aux longues années que mit Delbo non tant à écrire qu’à faire publier ce qu’elle avait écrit.
« Ce livre est mon cinquième et c’est le plus personnel, insiste Ghislaine Dunant. Mes précédents étaient des romans mais c’est dans celui-ci que j’évoque le plus fortement mon monde intérieur, mes sensations, mes raisons d’écrire, mon rapport au monde. Je voulais bien sûr mieux faire connaître Charlotte Delbo. Mais aussi évoquer le pouvoir des mots, la force de la littérature. »
S’il existait dans les librairies un rayon « auteurs qui sauvent », Charlotte Delbo en ferait partie. Ses livres, notamment « Aucun de nous ne reviendra » - récit de ses deux ans d’esclavage à Auschwitz -, ont permis à tant de victimes de génocide, de guerre, d’effondrement personnel, d’hommes et de femmes, qui voulaient renoncer car il leur était trop dure de continuer, de retrouver la vie.
Joschka Fischer, ancien ministre allemand des Affaires étrangères, a déclaré un jour que le fondement ultime de la communauté de destin européenne était la mémoire d'Auschwitz. Une femme, aujourd'hui injustement oubliée, en a eu la première intuition : c'est Charlotte Delbo. Pourquoi lire, en cette rentrée, le beau livre que lui consacre Ghislaine Dunant (Grasset) ?
Ghislaine Dunant signe une magnifique biographie de la grande écrivaine et témoin des camps nazis, qui met en lumière la difficulté avec laquelle son oeuvre s'est imposée
Ghislaine Dunant offre une plongée dans le parcours de cette femme"à la curiosité chevillée au corps". Et l'occasion de redécouvrir un récit parmi les plus puissants de l'univers concentrationnaire.
A sa libération en 1945, Charlotte Delbo écrit à son mentor Louis Jouvet en quoi la littérature a été déterminante pour sa survie et ce que les camps lui ont enseigné : «Trois années de méditation avec la mort et l’espoir tout à tour m’ont donné le pouvoir d’évoquer et de susciter les êtres dans leur vérité.» C’est ce qu’illustre avec force cette imposante biographie, qui suit le cheminement idéologique et personnel d’une intellectuelle engagée.
Etre étranger, étranger au monde, étranger à soi-même. C'est cet état, affolant de neutralité et de souffrance, que décrit Ghislaine Dunant dans "Un Effondrement", le récit d'une dépression.
Ghislaine Dunant a reçu en avril à Lausanne le Prix Dentan pour "Un Effondrement". Elle le partage avec Jean-François Haas. Rencontre avec une femme passionnée, sensible, dont la vie est écriture.
La Franco-Suisse Ghislaine Dunant est une des deux lauréats du Prix Dentan 2008, avec le Fribourgeois Jean-François Haas. Rencontre avec l'auteure d'Un effondrement, roman d'une sensibilité bouleversante.
Dix tours de scrutin, et le jury présidé par le professeur André Wyss n'est pas parvenu à trancher : "Dans la Gueule de la baleine guerre" de Jean-François Haas (Seuil) et "Un Effondrement" de Ghislaine Dunant (Grasset) se partagent le prix Dentan 2008, qui sera remis le 28 avril au Cercle littéraire de Lausanne.
Le tout premier roman de Ghislaine Dunant, "l'Impudeur", paru en 1989, était un beau récit sur le désir et la sensation. Le sujet du dernier est au fond assez proche. L'histoire est celle d'une femme qui, un temps, fuit vers "l'anesthésie psychique, sexuelle et sensible". Elle "se déserte". Une dépression? Le mot n'est jamais écrit, et il s'agit bien plus que de cela.
Qu'est-ce que vivre? Est-ce si difficile de vivre? Ghislaine Dunant est tombée dans la dépression. Un mal étrange, étranger. Un jour, tout bascule, sans bruit. C'est le mal dedans. On n'arrive plus à vivre.
Une jeune femme raconte sa plongée dans la dépression.
Elle ne se sent pas morte mais elle ne se sent pas vivante non plus. Elle est comme sous anesthésie générale.
"Un effondrement" n'est pas un énième témoignage sur "ma dépression" - pourquoi j'y suis tombé - comment je m'en suis sorti". C'est un texte littéraire qui traduit de façon subtile ce que ressent un dépressif au fil des jours qui coulent au compte - gouttes, décolorées, interminables.
Des mots simples, des phrases courtes menacées par l'aphasie: un style monochrome soutient de bout en bout ce récit de la dépression d'une jeune femme de 23 ans. Il imprime sur la page le " vide des journées" dans un univers hospitalier "lisse", "assourdi" et infantilisant, où "le corps est dépecé par le regard de l'infirmière".
Le récit de Ghislaine Dunant s'ouvre sur une scène de "Million Dollar Baby". La boxeuse, interprétée par Hilary Swank, sort du coma après une terrible chute.
Ghislaine Dunant décrit l'errance d'une jeune femme dans les couloirs d'une clinique psychiatrique. Un récit d'une douceur bouleversante sur la difficulté de vivre.
Jours blancs d'une pâle fatigue
Comment s'éteignent soudain les lumières de la vie, sous un brouillard d'épaisse fatigue, quand tout devient montagne. Plus d'envie, plus de désir, partant plus de joie. Un récit plein de tact et de délicatesse de l'écrivaine Ghislaine Dunant, née en 1950.
D'une lointaine dépression, Ghislaine Dunant a tiré un récit bouleversant. C'est un livre où l'on entre sur un K-O et d'où l'on sort, à mi-voix, du chaos.